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KOKOKARA
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A PARTIR D’ICI

Ce pourrait être un essai sur le principe de Genèse. Genèse du mouvement, Genèse des images, Genèse des histoires, Genèse de la relation, Genèse du théâtre.

Ce travail explore les phénomènes / forces à l’oeuvre d’avant l’apparition, avant l’évidence. C’est un travail dans la fuite du sens, à rebours des images et qui s’échappe des histoires qu’elles racontent. On part du noir, du chaos, à partir d’ICI dans l’invisible, dans l’innomé, l’insondable.

Il y a dans notre désir de travailler sur la genèse, une résis- tance à la logique de consommation, un refus de s’adonner à la solution / conclusion obligatoire :

- Est-ce que tout à nécessairement une fin, un sens ou une forme définitive ?

- Est-ce que l’advenir d’une chose n’est-il pas plus puissant dans sa version imaginaire, hypothétique ?

LA DRAMATURGIE

La pièce se construit comme une série de tableaux qui explorent chacun un principe, ou un exercice de genèse, donnant à voir la naissance, la construction d’une histoire, d’une danse, d’une image, d’une scène.
C’est une dramaturgie qui fonctionne par accumulation : chacun de ces tableaux comporte des sortes d’indices plus ou moins su- bliminaux qui inviteront le public à créer le sens qui le relie à ces propositions, et qui relie ces propositions entre elles.

D’où la nécessité de travailler dans des temporalités qui laissent aux spectateurs le temps d’établir un rapport intime et surprenant à ces images. Comme une sorte de résistance au rythme effréné de notre monde contemporain, nous voulons prendre le temps du ralentissement et de la contemplation.
Certains détails d’un tableau pourront se retrouver dans un autre mais exploités différemment, mis en lumière, agrandis, modifiés, sonorisés... acquérir une autre signification ou une autre valeur symbolique.

Malgré la trame de séquences qui devrait être bien établie au final, nous réfléchissons à une dramaturgie qui puisse accueillir aussi une certaine spontanéité, de l’accidentel, et autoriser des bifurcations. Il s’agit de se confronter à une certaine prise de risque performative et de laisser émerger le sublime que seul permet la transgression ou l’abandon.

NOS IMAGES

A partir de quand est-ce qu’on peut se dire « voilà une image » ?
Les images que nous proposons sont assez ouvertes et énigmatiques pour inviter le public à nourrir une relation personnelle à celles-ci, choisissant à l’envie le prisme qui lui convient, qu’il soit poétique, plas- tique, conceptuel... tout l’enjeu est de lui permettre cette relation mais aussi de le surprendre, déjouer la grille de lecture qu’il avait élaboré ; changer un détail, l’éclairage, le mode de présence, l’adresse, pour que l’action en cours change de statut.

L’envers des images que nous proposons sera aussi le terrain d’une nouvelle monstration qui évite nos lieux communs, nos zones de sécurité ; ces mécanismes de retournement des situations comme moteur d’éman- cipation, que ce soit pour le public, dans ses définitions du théâtre, mais aussi pour nous, en tant qu’artistes, machines à produire des images, du sens, de l’illusion, et puis pour nous en tant que femmes, encore assujetties à des normes comportementales stéréotypées. C’est aussi l’envers de nous-même que nous exposons dans l’envers de nos décors.

Il y a recherche de dépassement des images proposées, mais aussi de dépassement des clichés, et puis finalement le dépassement des anti-clichés grâce au poétique passant par l’absurde ou à l’abstraction.

Voici quelques exemples de scènes en travail :

LE MYTHE DE GAÏA
- Une origine du monde

Ce texte de la mythologie grecque raconte comment du Kaos est crée Gaïa la terre, qui à son tour crée d’autres éléments et créatures. Cette histoire est chargée de violence, de sexualité, d’une notion très particulière de la chair, à la fois divine et triviale. Quand Brune raconte l’histoire, elle remet en jeu son souvenir de celle-ci, son désir le la transmettre et les choix qu’elle y fait pour occulter ou insister sur certains détails.
L’histoire commence presque comme un conte d’enfant et devient un vrai cauchemar. Brune oscille entre différents types d’élocutions, celle du conteur, du comédien, du conférencier, du personnage incarné. Elle génère ainsi différents niveaux de lec- ture, explorant aussi différents rapports au public et à la scène. Il y a tout un travail sur la plasticité et la physicalité des mots qui se développe au cours du récit, qui nous conduit dans différents registres mentaux/ scéniques.

A travers les différentes tentatives de raconter cette même histoire, on découvre que c’est finalement l’exercice-même de raconter qui génère une chose en soi, un être hybride entre une comédienne qui cherche les modalités de sa représentation et une sauvagerie qui parle et se débat dans l’histoire. A travers cet exercice, Brune se crée, accouche d’elle-même...

GENESE DE LA DANSE

Il y a aussi des séquences essentiellement chorégraphiques, qui explorent le rapport primaire au mouvement, et le rapport primaire à la reconnaissance du corps, puis de la danse.
Il y a donc une danse qui se cherche, entre la nudité et l’effacement, entre l’apparition et l’obscurité, entre le charnel (animal, monstrueux, cellulaire) et l’imaginaire, le plastique, quasi holographique, immatériel.
Une danse où le danseur n’existe pas encore ; pas d’identité, de genre, de personnalité, de technique...
Une danse qui échappe à sa reconnaissance, qui se donne à vivre dans l’in-définition.

NATURE MORTE

Certaines séquences jouent à construire des images avec différents éléments qui sont tour à tour amenés dans le cadre, déplacés, enlevés.
Nous travaillons pour l’instant avec une branche d’arbre, une table, des fruits et légumes, et les deux corps, nus ou habillés.
Les deux interprètes aussi changent et échangent leur rapport à ces images élaborées, passant du statut de personnage à celui de technicien, de premier rôle à figurant.... Parfois le rôle change par le simple changement de lumière, ou le déplacement d’un seul élément, un changement de regard...
Il y a un jeu qui questionne le processus de création de l’image, met en dialogue le naturel et l’artificiel, le théâtral et le performatif.
Il y a toute une iconographie qui est convoquée là, plus ou moins identifiable, parfois picturale, cinématographique, photographique, publicitaire appartenant tant aux registres classiques, romantiques, que surréalistes ou abstraits... tout en fuyant et déconstruisant sans cesse les codes de ces références.

LA LUMIÈRE

La lumière est aussi là pour changer le statut de ce que l’on voit travaillant tantôt sur l’illusion, tantôt sur une vision brute de l’action ou de l’espace, oscillant entre la révélation et la disparition ou le travestissement total de la situation.

Projet porté par Brune Campos / Ikue Nakagawa
Eclairagiste Meri Ekola
Création musicale et sonore Cédric Castus
Regard Extérieur Lorenzo De Angelis

co-produit par Charleroi Danse
soutenue par la Bellone, le Centre Culturel Jacques Franck, le centre Culturel de Dommelhof...

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