A banana is a banana
 
Une femme entre. Traits apaisés. Peau lisse, lumineuse, corps droit. Seule, la pointe de ses pieds touche le sol. Le regard lointain, elle pivote lentement, sur elle-même. Elle sourit.
Soudain, ses chevilles se tordent.
Quelque chose d'intérieur la prend, lui parle, qu’elle nomme Love.
Que veut- Love ?
Elle cherche des réponses, instaure un dialogue avec Love, dans lequel elle tente d'inscrire son corps. Déstabilisée, ses jambes vacillent, de sa peau, perlent des gouttes de sueur. Son visage s’assombrit.
Elle construit une logique, enchaîne ses actions, fait, refait, s'investissant tout entière dans cet échange. Mais ce n’est pas assez, ce n'est pas ce que veut Love. Elle cherche encore, tente de comprendre, s’escrime à répéter. Provoquée encore et encore par Love, elle devine que ce ne sont peut-être pas les réponses attendues, mais elle continue, s'acharne follement. Comme portée, malgré elle, par des rails.
Ça devient drôle et en même temps, pas du tout.

"Nous assistons pendant 50 minutes à une humanité nue, crue et franche, qui évolue dans ses cycles de vie répétitifs… Une femme en talons, peu habillée, avec un «Love» poilu autour du cou, rentre dans un espace de proximité… ou presque… un espace vide… ou presque… son univers minimaliste et précis est composé de bananes, qu’elle récolte minutieusement, précieusement, avec une espèce de cageot/sac à main et une faucille. Elle est heureuse, ou du moins c’est ce qu’elle dit… «La journée est belle» nous dit-elle en anglais… nous parle-t-elle vraiment ? Son regard tournoyant sur ses hauts talons, comme son corps, à moitié nu, ne nous fixe pas des yeux… comme un «oui, ça va et toi ?» mécanique, que nous répétons tous les jours en société… et puis elle a ses bananes : les manger la rend heureuse – malgré son expression neutre et vague, comme si elle voulait convaincre l’univers d’une joie fugitive… les comptabiliser rend les journées belles, dans un jeu d’individualisation d’objets où on sent naître la satisfaction… mais «Love» n’est jamais content : il «wants more» !? Il ne le dit pas… cette dépouille de «Love» reste silencieuse et manipulatrice. Brune Campos maîtrise son environnement dans cette forme déstabilisante de spectacle, répétitive mais intrigante, où on pourrait discerner une démarche à la Composition en Temps Réel. Une performance sans faille qui nous interpelle, nous questionne, nous parle de l’humanité, de l’homme et de la femme, de la recherche du bonheur, des apparences, des rapports de manipulation social et intime, de sexe, de l’insatisfaction, de la soif de pouvoir… une pièce vraiment contemporaine et plus actuelle que jamais, dans notre contexte sociopolitique. Il y aura ceux qui ne verront peut-être qu’une récolteuse de bananes… mais si en bon portugais, on sait qu’une banane (= uma banana) c’est simplement un fruit, on saura qu’un banane (= um banana) c’est un «bon à rien», un «mou»; peut-être alors notre imaginaire pourra s’épanouir davantage. Gertjan van Gennip nous invite à 50 minutes d’une forte théâtralité, qui frôle souvent le comique, mais qui surtout touche là où ça dérange, avec une incroyable interprétation/création de Brune Campos, qui se met à nu dans cette danse («République») des bananes… et en plus, cerise sur le gâteau : à la fin, vous pourrez déguster ces objets (de désir) artistiques, en mangeant quelques bananes (ce sont des bananes qui ont vécu !) en parlant avec les artistes. De la jeune création juste et pertinente, qu’il faut soutenir. Ce premier solo de la jeune Todaycompany est un début prometteur (d’autant plus exportable, puisqu’il est en anglais) : espérons les revoir bientôt sur les planches." 
www.artistes-creatifs.blogspot.be

Interprétation / porteuse du projet Brune Campos
Mise en scène Gertjan van Gennip
Éclairage Françoise Libier

Partenaires :
CND de Pantin
OARA (Office Artistique Région Aquitaine)
Centre de Développement Chorégraphique de Toulouse.
Défi jeunes, Bordeaux Aquitaine, Nov.2005.
Les ateliers de la Manutention, Bordeaux.
Le Lido, Centre des Arts du Cirque, Toulouse.
Regards et Mouvements, Pontempeyrat (42).